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Description
Bien que réalisée en 1816 pour une série de gravures représentant les uniformes de l’armée française sous la Restauration, cette image d’un fantassin sur fond de montagnes boisées évoque le cordon sanitaire que déploya le gouvernement français tout au long de la frontière des Pyrénées lors de l’épidémie de fièvre jaune qui sévit en Catalogne en 1821.
Une telle mesure n’avait rien d’exceptionnel et l’Espagne aussi eut recours à la force armée pour isoler les zones contaminées : non seulement les deux agglomérations les plus touchées par le fléau, Barcelone et Tortosa, furent entourées d’un double cordon, mais pratiquement toutes les villes de Catalogne furent encerclées par la troupe et la Catalogne fut coupée du reste du royaume sur ses frontières avec l’Aragon et le royaume de Valence par un dispositif militaire qui ne laissait passer que ceux qui pouvaient exhiber un passeport (que l’on appellerait de nos jours pass sanitaire) attestant qu’ils n’étaient pas atteints par la maladie.
En revanche, l’ampleur du dispositif mis en place en France (qui s’étendait de la Méditerranée à l’Atlantique, à presque 600 km du foyer de l’épidémie) et la présence de régiments d’artillerie parmi les forces chargées de la surveillance de la frontière, ne laissèrent aucun doute, pour les Espagnols et les libéraux français, sur le fait qu’il s’agissait en réalité de la mise en place d’une armée prête à intervenir à tout moment dans le pays voisin.
Louis XVIII, lors de l’ouverture des séances des chambres des pairs et des députés le 5 novembre 1821, protesta bien qu’il s’agissait uniquement de « précautions » destinées à préserver la France de la contagion, et que « seule la malignité pouvait leur attribuer d’autres causes ». Mais les ultra se réjouirent ouvertement d’une telle mesure destinée à empêcher que ne se répande en France la « peste révolutionnaire » comme le réclamait une chanson d’un certain M. T de Terrefort publiée en 1822 dans L’Anti libéral ou le Chansonnier des braves gens, et intitulée précisément « Le cordon sanitaire » :
« Craignons un fléau plus fatal
Que Mégère, que Tisiphone :
Le jacobin fait plus de mal
Mille fois que la fièvre jaune :
Faisons plus que réprouver
L’odieuse jacobinière,
Formons pour nous en préserver
Le cordon sanitaire. »
La surveillance de la frontière fut des plus rigoureuses, et, par exemple, à Pont-le-Roi (département de la Garonne) un pauvre mendiant espagnol qui avait déjà tenté de passer en France fut abattu par une sentinelle pour ne pas s’être arrêté à son ordre. Et, selon un député aux Cortès, des marins des îles ioniennes débarqués clandestinement sur le littoral près de Collioure furent passés par les armes, sans autre forme de procès.
Mais cette sévérité dans l’application de la consigne m’empêcha pas le gouvernement d’avoir quelques inquiétudes sur l’attitude des militaires qui composaient le cordon sanitaire puisqu’il dut, au Boulou, faire relever la garnison du fort de Bellegarde qui avait fraternisé avec les militaires espagnols qui leur faisaient face de l’autre côté de la frontière… et se vit dans l’obligation, pour le même motif, de remplacer presque immédiatement les nouveaux arrivants. De tels faits suscitèrent bien des espoirs parmi les libéraux, espagnols et français. Mais cela n’empêcha pas les troupes françaises de rester fidèle aux Bourbons et, juste avant de franchir la Bidassoa, de tirer à mitraille sur leurs anciens camarades passés au service de l’Espagne constitutionnelle qui, en arborant le drapeau tricolore, tentaient de les débaucher.
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Département des Estampes et photographie, PETFOL-0A-381
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Document numérique: IFN-8426884