Titre
Vol de grues passées le 17 mars 1721, Bouyon fecit anno 1721, avril 14e l’an de la peste
Description
Rumeurs et signes annonciateurs du mal.
« Vol de grues passées le 17 mars 1721, Bouyon fecit anno 1721, avril 14e l’an de la peste ».
Longtemps conçue comme un acte de vengeance ou un châtiment envoyé aux hommes par une divinité offensée, la peste serait annoncée par divers signes, particulièrement par des manifestations célestes (conjonction de planètes, éclipses et comètes). Les comètes observées à Londres en décembre 1664 et janvier 1665 auraient été, pour des astrologues comme John Gadbury, les « messagers » de l’épidémie de 1665. Le « vol de grues passées le 17 mars 1721 » à Toulon, qui illustre la troisième de couverture d’un registre municipal est à classer parmi ces présages. Il a été dessiné par le notaire Jean-François Bouyon et signé du 14 avril 1721, soit le lundi de Pâques de cette année-là. Le vol de ces oiseaux, formant triangle et se dirigeant vers la gauche (« sinistre » direction selon l’interprétation de certains prodiges), passe au-dessus de deux bâtiments de mer : La Délaïde et le Vermandois « anglais ». De tels signes, « que l’on tire d’accidents fortuits », ce qui est pour Furetière la définition même de la superstition, appartiennent, au registre des événements qui annoncent la calamité à venir. L’identification des deux navires pose problème. Il est peu probable, malgré une semblable apparence, que l’un d’eux soit le Grand Saint-Antoine qui a introduit le mal à Marseille en mai 1720. S’agit-il de bâtiments alors dans la rade de Toulon ? Un Vermandois, de 64 canons, présent en 1707, lors du siège de la ville par les Impériaux, et signalé échoué en 1718 à Toulon, a-t-il été renfloué ? Un navire Adélaïde figure également dans le port militaire lors de ce même siège, puis participe sous le commandement du corsaire Roquemadore à de lointaines expéditions. Faut-il voir là deux vieux bâtiments transformés en pontons pestiférés par les autorités toulonnaises, à l’instar de l’Indomptable, ancien vaisseau mouillé au Mourillon à l’est de la ville, chargé de mendiants ou de malades sans-abri qui auraient été placés là pour deux mois, avec un médecin, un aumônier, deux commis et des vivres ? S’agit-il de scène vue et interprétée par le notaire ou la simple représentation d’une rumeur ? Une semblable malédiction céleste tombe sur Tarascon au printemps 1720 sous la forme d’un nuage de criquets « gros comme le doigt » contre lesquels est mobilisée toute la population pour les écraser. Ce sont également les sauterelles qui attaquent la campagne arlésienne ruinant les récoltes en quelques heures. En mai 1720, l’archevêque Jacques de Forbin-Janson conduit une procession, pieds nus et corde au cou, pour demander l’aide du ciel contre ce fléau qui peut en annoncer un autre. Le terrible orage qui a frappé Marseille dans la nuit du 21 au 22 juillet 1720 a également été regardé comme « le funeste signal de la plus affreuse mortalité qu’on ait jamais vue », ainsi que le rapporte le docteur Jean-Baptiste Bertrand qui se garde toutefois « d’adopter les préventions du peuple touchant l’apparition des signes célestes qui précèdent les grandes calamités. »
« Vol de grues passées le 17 mars 1721, Bouyon fecit anno 1721, avril 14e l’an de la peste ».
Longtemps conçue comme un acte de vengeance ou un châtiment envoyé aux hommes par une divinité offensée, la peste serait annoncée par divers signes, particulièrement par des manifestations célestes (conjonction de planètes, éclipses et comètes). Les comètes observées à Londres en décembre 1664 et janvier 1665 auraient été, pour des astrologues comme John Gadbury, les « messagers » de l’épidémie de 1665. Le « vol de grues passées le 17 mars 1721 » à Toulon, qui illustre la troisième de couverture d’un registre municipal est à classer parmi ces présages. Il a été dessiné par le notaire Jean-François Bouyon et signé du 14 avril 1721, soit le lundi de Pâques de cette année-là. Le vol de ces oiseaux, formant triangle et se dirigeant vers la gauche (« sinistre » direction selon l’interprétation de certains prodiges), passe au-dessus de deux bâtiments de mer : La Délaïde et le Vermandois « anglais ». De tels signes, « que l’on tire d’accidents fortuits », ce qui est pour Furetière la définition même de la superstition, appartiennent, au registre des événements qui annoncent la calamité à venir. L’identification des deux navires pose problème. Il est peu probable, malgré une semblable apparence, que l’un d’eux soit le Grand Saint-Antoine qui a introduit le mal à Marseille en mai 1720. S’agit-il de bâtiments alors dans la rade de Toulon ? Un Vermandois, de 64 canons, présent en 1707, lors du siège de la ville par les Impériaux, et signalé échoué en 1718 à Toulon, a-t-il été renfloué ? Un navire Adélaïde figure également dans le port militaire lors de ce même siège, puis participe sous le commandement du corsaire Roquemadore à de lointaines expéditions. Faut-il voir là deux vieux bâtiments transformés en pontons pestiférés par les autorités toulonnaises, à l’instar de l’Indomptable, ancien vaisseau mouillé au Mourillon à l’est de la ville, chargé de mendiants ou de malades sans-abri qui auraient été placés là pour deux mois, avec un médecin, un aumônier, deux commis et des vivres ? S’agit-il de scène vue et interprétée par le notaire ou la simple représentation d’une rumeur ? Une semblable malédiction céleste tombe sur Tarascon au printemps 1720 sous la forme d’un nuage de criquets « gros comme le doigt » contre lesquels est mobilisée toute la population pour les écraser. Ce sont également les sauterelles qui attaquent la campagne arlésienne ruinant les récoltes en quelques heures. En mai 1720, l’archevêque Jacques de Forbin-Janson conduit une procession, pieds nus et corde au cou, pour demander l’aide du ciel contre ce fléau qui peut en annoncer un autre. Le terrible orage qui a frappé Marseille dans la nuit du 21 au 22 juillet 1720 a également été regardé comme « le funeste signal de la plus affreuse mortalité qu’on ait jamais vue », ainsi que le rapporte le docteur Jean-Baptiste Bertrand qui se garde toutefois « d’adopter les préventions du peuple touchant l’apparition des signes célestes qui précèdent les grandes calamités. »
Couverture
Couverture spatiale
Provence
Couverture temporelle
Date
Type
Archive
Langue
Contributeur
Relation
Buti, Gilbert, « Lettres de Toulon pendant l’épidémie de peste de 1720-1722 », dans Signoli Michel, Dutour Olivier, Boëtsch Gilles, Cheve Dominique, Abadian Pascal, (dir.), Peste : entre épidémies et sociétés, Florence, Firenze university Press, 2007, pp. 155-162.
Buti, Gilbert, La peste à La Valette, Marseille, Autres Temps, 1996.
Bertrand, Régis, « La dernière grande peste » dans Philippe Joutard (dir.), Histoire de Marseille en treize événements, Marseille, Jeanne Laffitte, 1988.
Biraben, Jean-Noël, Les hommes et la peste en France et dans les pays européens et méditerranéens, 2 volumes, Paris-La Haye, Mouton, 1975-1976.
Caylux, Odile, Arles et la peste de 1720-1721, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2009.
Navarranne, Pierre, « M. d’Antrechaus, maire de Toulon: son empirisme organisateur », Bulletin de l’académie du Var, 1995, pp. 83-110.
Vignal, Robert, De la Peste à la Révolution, Tarascon au XVIIIe siècle, Montpellier, Presses du Languedoc-Max Chaleil éditeur, 1989.
Référence bibliographique
Vol de grues passées le 17 mars 1721, Bouyon fecit anno 1721, avril 14e l’an de la peste, Jean-François Bouyon, 1720-1721, Archives municipales de La Valette-du-Var. II-20
Source
Archives municipales de La Valette-du-Var. II-20
Droits
Domaine public
Ayants droit
Cliché : Gilbert Buti
Format
36 cm x 25 cm
Support
Registre papier texte manuscrit